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Le ciel était désormais drapé d’étoiles scintillantes de milles éclats. Alors que son amant se dirigeait vers le voilier à deux mâts dans une démarche langoureuse, Max tourna lentement sa tête vers les cieux, se demandant si ce maelstrom qui la culbutait – sans mauvais jeu de mots – était dépourvu de raisons. Perdre le contrôle n’était pas acceptable après toutes les épreuves qu’elle avait pu traverser.
La brise nocturne caressait les palmiers, le conciliabule était désormais ponctué de hoquets éthyliques et de quelques pirates s’adonnant à des fécaux barratages dans les fourrés en l’honneur du Dieu Piques.
Elle ne percevait plus que le susurrement des vagues venant s’échouer contre le littoral, écho lointain et discret de ses pensées enfouies et foncièrement irrationnelles. Deux cycles lunaires auparavant, elle aspirait encore à périr noyée sur son Île du Réhal, en ce lieu insignifiant et dérisoire dénommé Pabladur, où Fortesque, avec toute la complaisance du monde, lui avait érigé une bibliothèque et des latrines, dans l’optique qu’elle puisse subvenir à son bonheur. Et à présent, voilà qu’elle désire l’anéantissement de tous les protagonistes qui transforment son existence en une véritable divine comédie ! De ces pirates infâmes, obsédés par les courbes voluptueuses de sa poitrine, de ceux qui la considèrent comme une alliée loyale, voire même de ceux qui l’ont aimée, d’une affection aussi pure qu’indéniable. Et tout cela, uniquement pour un homme affublé d’un pendentif draconique en obsidienne ! Un hâbleur, fanfaron, imbu de lui-même, qui plus est… ça n’avait aucun sens.
Elle fit mine de penser, telle une mygale ornementale, avoir tissé les fils d’une séduction calculée où le très cher Tom ne pouvait s’échapper. Mais le piège s’était aussitôt refermé sur elle : il était bien plus éloquent, bien plus expérimenté, bien plus calculateur et malin qu’elle et ce sentiment de frustration à avaler lui laissait un goût d’amertume. Max était agacée, agacée de s’être fait prendre dans ce tissage de fibres dont elle ne pouvait plus s’extirper, elle en avait trop dit et pourtant si peu, la soie cribellée avait enrobée l’intégralité de son corps…
“Mais pas encore mon âme”, murmura t-elle, comme pour tenter dans une ultime peine de se raccrocher à quelque chose de si futile.
Elle ne quitta point le dos de Tom des yeux, qui était désormais sur le ponton de l’Oeil-de-Rubis. Un magnétisme invisible et pourtant palpable les liait, elle était devenue ce minuscule arachnide pris au piège, avec un prédateur mille fois plus fort qui allait la broyer de ses chélicères avant de lui injecter une dose létale de venin.
La fausse indifférence de Tom qui gambadait sur le pont du bateau, caressant son médaillon en souhaitant une bonne nuitée à cet équipage voué à disparaître lui tiralla les joues : elle pris nerveusement sa tignasse d’ébène, noua un chignon asymétrique et y glissa une épingle qui traînait dans ses poches, puis pris une inspiration tremblante avant de le rejoindre.
Le ciel d’encre, les confidences, l’invitation, le tumulte intérieur : rien n’allait, pour quelqu’un qui avait ourdit un plan désormais ébranlé par la présence d’un seul être, elle était déstabilisée au possible. Mais cette perte de contrôle lui rappela qu’elle pouvait, aussi, avoir le droit de vivre et le droit inaliénable à la liberté… et surtout, à un sentiment qu’elle ne pouvait nommer. Ce fameux sentiment qui contrôle le monde, celui qui provoque dans la majeure partie du globe le repeuplement, celui qui fait soulever des montagnes et déplacer les océans.
De près, l’Oeil-de-Rubis semblait irréel. Max pensa presque un instant qu’elle avait tout inventé de toutes pièces. Comme son ami imaginaire qui l’avait accompagné dans son enfance, ce petit dragonnet vert dont elle avait oublié le nom, comme ces moments où les violences de la vie l’avaient conduites à une amnésie partielle, comme ces propos outranciers qu’on lui avait balancé pour la placer au rang social de simple ribaude. Peut être était-elle folle ? Ou… folle de lui ?
L’homme était déjà rentré à l’intérieur du vaisseau quand elle enjamba la petite portière de frêne qui la séparait du ponton branlant. Elle se sentit flotter sur les eaux cristallines, observa d’un coup de son unique œil discret son équipage qui scandait des chansons paillardes des plus pittoresques, puis se dirigea vers sa cabine. Elle avait transpiré, son maquillage était d’une fraîcheur fanée et elle se sentait à l’étroit dans ses habits trop serrés, mais il fallait qu’elle y aille.
Tom était désormais dans les entrailles de l’Oeil-de-Rubis. Il savait que Max allait le suivre, que son esprit torturé de désirs contradictoires la mènerait inévitablement vers lui. La manière dont elle l’avait regardé, la tension palpable dans l’air, tout indiquait qu’elle était prête à franchir cette ligne.
Il se déplaça dans les couloirs sombres du navire, choisissant avec soin un renflement ténébreux, un endroit stratégique, juste à côté de la cabine principale. Il sentait la vibration du bois sous ses pieds, anticipant ainsi chaque pas qui s’approchait. Il s’assura que les quelques mètres de corde qu’il avait préparés étaient prêts… Et il attendait; le dos plaqué contre le mur.
Il finit par entendre le grincement caractéristique de la porte menant vers les cales, à l’approche de la cabine. Elle arrivait. Le bruissement des tissus de sa vêture, le souffle un peu plus rapide de son désir mêlé d’appréhension ; tout cela résonnait dans l’esprit du contrebandier comme une rythmique obsédante. Il se prépara, son esprit calculant chaque mouvement à venir…
Et puis, elle fût là. Max, visiblement troublée, mais déterminée, franchit le seuil du couloir. Elle ne vit pas l’ombre qui se mouvait silencieusement derrière elle, ni l’entrave qui glissa subtilement entre les mains de Tom. Il attendit qu’elle passe devant lui, qu’elle soit à sa portée. Vulnérable.
Soudain, d’un mouvement fluide, il se glissa derrière elle, vif comme le serpent. Il la plaqua fermement face au mur avant d’enrouler sa corde autour de ses poignets, avec une habileté froide, serrant juste assez pour la maintenir captive, sans lui faire de mal … du moins pas encore.
Il sentit la tension vibrer dans l’air alors qu’il maintenait la Shakrass contre le mur. Il se pencha au creux de son cou, ses lèvres en effleurant la peau, laissant une traînée de chaleur là où il passait. Sa voix, un murmure rauque, résonna aux oreilles de Max.
“Tu sens ça, Max ? Cette chaleur qui monte entre nous ? C’est l’incendie que je suis prêt à allumer. Un brasier pour nous consumer entièrement. Toi qui veux tout abandonner … Es-tu prête à t’abandonner toi ?”
Le lien de chanvre, rugueux à souhait, épousa néanmoins les poignets de la Capitaine et maîtresse incontestée des lieux, qui se trouvait désormais paradoxalement emprisonnée dans une contrainte qui lui semblait libératrice. Promesses d’abandon et de soumission par une éloquence sublime, qui plus est ? Mais qu’est ce qu’elle avait fait ? L’homme ouvrit lentement la porte de la cabine, sa proie toujours fermement attachée, et rien n’avait changé depuis la veille. Les draps de satin, d’un rouge sang d’une part et noir comme les freux de l’autre, étaient dispersés sur l’énorme lit qui avait dû subir quelques tumultes la veille. L’odeur de musc, d’encens et de cannelle était toujours une effluve aussi aphrodisiaque pour elle, effluve qui lui laissa transparaître une totale vulnérabilité qu’elle ne voulait absolument pas montrer à son amant.
Cette torture de cet instant suspendu, sans trop de longues paroles ni d’émois partagés, le mystère de cet éphèbe au regard perçant, et ses sentiments à elle, tout n’était que poison. Un poison si brûlant qu’il n’aurait fallu qu’une goutte pour y provoquer une déflagration des plus fatales.
Le bruissement des vagues contre la coque lui permettait encore de se dire qu’elle pouvait sentir autre chose qu’un désir ardent, que la torpeur dans laquelle elle était n’était pas la seule chose indéfinissable de ces dernières vingt-quatre heures.
“Tom…” glissa t-elle, les poings liés dans le dos. “Qu’est-ce que c’est que ce manège ? Chaque putain de seconde passée avec toi est une énigme auquel je ne peux répondre. Que veux-tu de moi ? Mon cœur est indomptable comme la houle, et tu veux me rendre captive ? Pourquoi suis-je enchaînée ainsi, non pas par ton cordage, non, mais par ce flot de sentiments qui m’étreint si cruellement ?”
Ses paroles semblèrent de glace alors qu’elle avait fondu comme un petit glaçon posé sous le Zénith Réhalien. Elle avança doucement vers sa coiffeuse, tenta maladroitement de se placer sur le tabouret, puis fixa avec amusement ses bottes lacées, ses talons résonnant nerveusement sur le parquet poli.
“Très drôle, Monsieur la Tempête. Et comment je me déchausse, maintenant ? ” sa voix vacilla entre humour d’adolescente prépubère en proie à une montée hormonale, et timbre sérieux de femme prise au piège face à cette soif insatiable de savoir la suite des évènements.
Tom laissa quelques instants s’écouler alors qu’ils pénétraient l’alcôve. Il souriait intérieurement, même si sur son visage, il n y avait rien d’autre qu’un masque sévère en cet instant. Elle essayait de cacher son trouble, derrière des mots, des provocations goguenardes. Mais il n’était pas dupe.
S’approchant d’elle avec une lenteur mesurée, il se pencha, si près, que son souffle chaud effleurait sa nuque. Il murmura à voix basse, teintée d’une douce moquerie.
“Tu parles trop, Max. Tu n’as pas besoin de comprendre ce qui se passe. Pas ici. Pas maintenant. Tu veux des réponses, alors que tout ce que tu as à faire, c’est de lâcher prise. Le reste … ne compte plus.”
Il recula légèrement, son regard perçant rencontra celui de Max dans l’obscurité, dans le reflet du miroir de la coiffeuse. Un instant, il la laissa contempler l’image qu’ils formaient.
“Tu vas goûter à l’inconnu et à l’interdit. Après tout, c’est là où tes pas te mènent.”
Sans attendre de réponse, il la saisit fermement par les épaules et la fit basculer face contre le lit, en un mouvement fluide. La chute fût douce, mais sans alternative. Une vérité inévitable. Et une ironique allégorie.
Il se redressa, observant Max affaissée, accusant encore l’impact. Il se dirigea vers un coffret de bois près du lit, et en sortit des bougies. Il les alluma, une par une, lentement, glissant les mèches sur celle embrasée de la lanterne écarlate. Une lueur plus chaude, et bien plus dangereuse, commença à vaciller dans la cabine. Celle de ces nombreuses flammes nues, prêtes à lécher la moindre parcelle de satin, la moindre voilure de soie, jusqu’aux planches de bois précieux du lit. La destruction à portée de main.
L’odeur de cire, mêlée à celle du musc, emplit l’air, intensifiant l’atmosphère chargée. Les bougies furent toutes patiemment disposées autour du lit, sur le mobilier, sur les bordures de la natte où le spectacle allait bientôt commencer, même sur les mains tendues des statuettes qui vibraient dans cette nouvelle lumière de décadence.
Tom garda néanmoins une bougie, s’approchant du lit, s’asseyant sur son bord. Il passa un doigt sur ses lèvres, capturant son attention avec une intensité suffocante. Puis, lentement, il fit couler un mince filet de cire chaude sur l’épaule dénudée de la Shakrass. Avec chaque goutte, il soulignait son emprise sur elle, et la réaffirmation de ce lien qu’ils partageaient.
“Ne lutte pas …Ce que je fais, ce n’est pas une punition. C’est une renaissance. Le feu, Max, le feu. Il remet tout le monde à zéro.”
Il écarta vivement le tissu de la chemise, dénudant son dos, et pencha de nouveau la bougie, la cire glissant au creux même de sa nuque, le long de la colonne de la capitaine pirate.
“Sens comme tu es vivante …Ressens chaque instant. Chaque goutte de cette cire est un rappel de ce que tu es prête à sacrifier. Ta liberté, ton contrôle. Tout ce qui te rend vulnérable..”
Il se pencha alors au-dessus d’elle, venant à nouveau souffler au creux de son oreille.
“Et ce n’est que le début…”
Max était à plat ventre, la chemise ouverte, sentant l’encolure de ses seins s’écraser sur la soie encore humide de la veille. Son cœur battait d’un rythme encore plus fort que la veille : même les pires voyages en mer où elle avait cru rendre l’âme ne lui avaient fait cet effet un jour.
Sa bouche était entrouverte mais elle ne put échapper le moindre son. La cire s’était mollement figée sur la partie la plus érogènement accessible de son corps : son dos. Ce mouvement semblait être suspendu dans le temps, comme si chaque instant partagé était un fragment d’éternité qu’elle ne voulait jamais voir s’évanouir.
La lueur tremblotante de la lampe à huile se mit à danser sur les parois de la cabine, projetant une lueur où Max, si elle élevait légèrement sa tête enfoncée dans le satin, pouvait y entrevoir l’ombre de son amant cruel. C’est comme si ce jeu de lumière pouvait refléter en elle les remous de son âme en proie au délice de ce tourment enflammé.
Elle ferma son unique œil, déjà humide, et serra les dents si fort qu’elle se pinça la langue. Rêvait-elle ? Cette rencontre brûlante n’était-elle pas le fruit de son plus gros fantasme débridé ? Tout semblait si réel, de l’ester gras sur ses écailles jusqu’aux relents d’effluves de la cabine, en passant par les volutes échappées des bougies.
“Si cette nuit est un rêve…” laissa t-elle échapper, dans sa misère la plus totale. “Alors je ne veux plus jamais me réveiller.”
Son entrejambe frémit alors, et sa queue reptilienne effectua un mouvement brusque et sonore qui trancha la brume diffusée par les flammes vacillantes de la lampe à clapotis. Ses lèvres s’étirèrent en un sourire presque imperceptible, un sourire qui défiait autant qu’il invitait. “Tu y croyais vraiment ? Je suis insaisissable, Tom. Et pourtant, indissolublement liée à ton existence. Tu crois qu’en m’attachant et en me versant de la cire mollassonne sur ma peau, tu vas me passer au rang d’esclave ? Ah !” elle fouetta de nouveau l’air avec son appendice caudal. “Cruel tu es… mais je suis non seulement tenace, mais également insatiable. Je suis TON Capitaine.”
Elle n’en croyait pas un traître mot, et son jeu d’actrice était des plus misérable. Même les Téhuns les moins doués de la Baie du Gong faisaient de meilleures prestations. Elle tenta alors avec l’énergie du désespoir de s’extirper de ses liens, mais son amant était bien plus adroit qu’elle aux arts de la corde.
Tom observa Max avec une lueur de défi dans les yeux, un sourire en coin qui traduisait à la fois amusement et désir. Sa main se posa sur son dos, là où la cire s’était solidifiée en une mince couche, suivant les courbes de son corps avec une lenteur calculée. Il pouvait sentir les frissons qu’il provoquait, même si elle cherchait à dissimuler l’effet de ses gestes.
« Détrompe-toi, ma chère Capitaine, » murmura-t-il en s’approchant de son oreille, sa voix un mélange de douceur et de menace voilée. « Je ne cherche pas à te réduire en esclavage… Non, ce serait bien trop simple, et bien en deçà de ce que tu mérites. »
Il fit couler un nouveau filet de cire, cette fois plus bas,jusqu’à ce qu’elle atteigne la base de son dos. Il attendit une seconde, savourant la tension qui montait en elle, puis reprit la parole, sa voix se faisant plus basse et plus grave.
« Tu te crois insaisissable, Max. Et c’est ce qui te rend si fascinante. Mais ce n’est pas moi qui suis ici pour te capturer… C’est toi qui te perds, dans tes propres filets.«
Il laissa une main glisser sous elle, effleurant à peine sa peau avant de la retourner avec fermeté pour qu’elle soit sur le dos. Les bougies autour d’eux projetaient des ombres mouvantes, créant une atmosphère aussi envoûtante que menaçante.
« Je n’ai aucun intérêt à te rendre esclave, parce que je veux que tu viennes à moi de ton plein gré. Que tu abandonnes chaque dernière parcelle de contrôle, non pas parce que tu y es forcée, mais parce que tu le désires plus que tout au monde.«
Il approcha la bougie de son ventre, observant la flamme vaciller dangereusement près de sa peau. Il s’attarda, laissant la chaleur lui rappeler qu’elle était toujours à la merci de ses gestes.
Max sentit les arabesques invisibles à travers son épiderme, et lâcha un soupir des plus érotiques. La soumission ? Elle qui était une féroce et irascible chef de navire ? Fallait-il qu’elle cède aux sirènes de la reddition absolue, quitte à ce que son cœur se brise comme du verre, ou ce prélude exquis à la douleur n’était pas du tout une forme de capitulation mais au contraire, d’une confiance aveugle en ses sentiments ?
Elle était si léthargique qu’elle ne sentait même plus les liens qui enserraient ses poignets. Ce n’était plus la contrainte physique qui la paralysait, mais le fait que tous les muscles de son corps semblaient se tendre entre le désir de liberté et de dire réellement ce qu’elle pensait de Tom, et celui de résister pour lui prouver qu’elle était cette espèce de femme séductrice et insaisissable. Tomber dans l’abîme pour goûter à la vérité brute de ses sentiments, au risque de se fracturer tous les os jusqu’à l’astragale, était déraisonnable au possible. Mais elle en brûlait d’envie. Autant que l’incandescence des bougies autour d’elle.
Alors, elle usa de sa dernière carte possible : fixer l’homme qui se tenait debout en face d’elle. Tenter de percer les secrets les plus inavouables de cet observateur méticuleux, de cet apollon bêcheur qui avait tout retenu de qui elle était et de ce qu’elle aimait, quand elle était toujours paumée dans ses propres contradictions.
Cette façade de contrôle absolu, cette assurance presque insolente, de la part d’un homme qui avait lu en elle comme dans un livre ouvert aux caractères gras et avec des dessins anatomiques précis, tout cela en si peu de temps, lui paraissait irréel. Elle se pinça la lèvre une nouvelle fois, une fois de plus pour s’assurer qu’elle n’était pas en proie à une crise hallucinatoire, mais non. Il était bien le reflet exact de ses propres désirs. Le mystère le plus complexe qu’elle n’ai jamais eu à résoudre.
Elle s’attela à sonder les profondeurs des yeux du contrebandier, scruta le moindre rictus de son visage, son unique prunelle voulant disséquer le passé, le présent et surtout, le futur de cet amant nocturne à la sérénité beaucoup trop troublante. Ce combat d’âmes et ce tourment intérieur l’ébranla au plus profond qu’elle ne l’aurait cru possible, et une goutte saline s’échappa lentement de son œil saurien.
Le contrebandier se perdit dans le regard de Max, sentant une satisfaction profonde à cet échange silencieux. Le contraste entre la fougue de ses mots et la fragilité de son visage était tellement évocateur de ses contradictions. Il s’agenouilla lentement sur le lit, entre les cuisses de Max, rapprochant la bougie encore plus de son ventre, les ombres vacillantes se déplaçant en ondulations sensuelles sur sa peau nue. Il fit couler la cire chaude sur son ventre, faisant glisser la bougie le long de ses côtes dans une caresse ardente.
“Regarde-moi, Max”, murmura-t-il de sa voix basse, dans un chuchotement aussi brûlant que la flamme léchant ses chairs.
Il voulait qu’elle se plonge dans son regard, et se rende ainsi aveugle à toute autre stimulation visuelle, une manière pour lui de lui faire pleinement ressentir le reste. Il descendit plus bas avec la bougie, caressant lentement l’intérieur de ses cuisses.
“Chaque regard soutenu, est une invitation …” souffla-t-il, quoique cela puisse bien vouloir dire…
Il approcha son visage du sien, les lèvres effleurant son cou, soufflant encore.
“Tu n’as rien à me prouver. J’ai déjà tout vu. Tout ce que tu as à faire, c’est d’accepter d’être vulnérable…”
Sans rien ajouter, il glissa sa main sous les hanches de Max, et l’aligna parfaitement dans le prolongement des lueurs des bougies placées autour d’elle, créant un jeu d’ombres sur le corps de la Shakrass.
A chaque mouvement de Tom, Max qui cherchait toujours à décrypter ce mystérieux personnage, pouvait déceler une sorte d’harmonie entre la sensualité brutale de la cire et la finesse de son approche. Ses gestes étaient empreints d’une maîtrise et d’une sérénité qui allaient au-delà de ce qu’un simple amant pouvait offrir. Ses bras, ses mains, ses doigts, semblaient des prolongations naturelles des flammes qu’il laissait courir contre la capitaine pirate, comme chargés d’une histoire plus vaste emplie de secrets inavoués.
Comme en réponse à ses préoccupations, mais aussi dans la continuité de cet apprentissage subi, il murmura à nouveau, son visage à quelques pouces du sien, son regard fixement niché dans celui de son amante.
“Le passé est un enchevêtrement de choix et de regrets. Mais le présent est tout ce que nous avons. La vérité n’existe que maintenant.”
Il souffla alors sur la mèche de la bougie avant d’embrasser fougueusement la femme-lézard entravée, dans le nouvel halo de ténèbres qui les entourait. Dans cette pénombre, elle put sentir le corps de l’homme frémir, entendre le cliquetis métallique assourdi d’une ceinture qu’on défait, et le contact froid de la boucle sur la peau tout juste brûlée par la cire.
C’est le contact de la peau de Tom qui se fit sentir ensuite contre la sienne. Ses dents dans son cou. Ses griffes sur ses flancs. Il la départissait, avec une insistance obsessionnelle de l’ensemble des artifices inutiles qui couvraient sa chair. Il la voulait, nue et offerte.
Il saisit sa mâchoire d’une main ferme, lui faisant redresser le regard vers le sien, plongé dans une obscurité qui semblait trop dense pour être vraie.
“Regarde-moi, encore”, dit-il, sa voix transmuée dans un souffle rauque. “Rien d’autre n’existe ici. Oublie tout le reste.”
Il approfondit ses mouvements, la pénétrant soudainement, dans un rythme lancinant, une cadence qui s’alignait lentement sur les battements de leurs cœurs à l’unisson…
C’était scellé : Max avait perdu la lutte. Elle avait cédé sous les murmures rauques échappés des lèvres de son amant alors qu’il utilisait sa ferveur pour la pourfendre, elle avait cédé sous cette voix lente et délicieusement insoutenable, mais surtout et plus que tout, elle avait cédé sous le poids d’une passion qu’elle n’avait jamais osé nommer.
Chaque geste, chaque caresse, paraissait impeccablement placé pour réduire la carapace de la Capitaine à l’état de simple poudre organique. Il avait tout scruté, tout analysé, et de failles en failles, il avait réussi à faire éclater des années de construction de sa couche protectrice si dure et si complexe.
L’impétuosité légendaire de Max n’était plus. Elle n’était plus prisonnière de ce tourbillon de sensations qui défiait toute sa logique : elle n’avait plus de raison d’être, plus de raison de lutter. Leurs souffles s’accordaient en une cadence presque rituelle et bestiale : chaque saccade provoquée par l’éphèbe était comme un massage cardiaque pour la pirate, qui commençait à percevoir cette perte de soi comme une résurrection. La hiérarchie était posée, il était maître de faire d’elle ce qu’il voulait : il était indubitablement plus fort, mais beaucoup plus malin, beaucoup plus intelligent, et surtout beaucoup plus observateur.
Au rythme des secousses cardiaques qui l’a ramenèrent à la vie, une nouvelle force pris la forme d’une transcendance. Mais alors qu’elle commençait à exalter, dans ce cocon de ténèbres d’une chaleur étouffante, elle se rendit compte qu’il n’y aurait plus de marche arrière possible. Comme un écho à sa propre solitude alors que nul homme auparavant de l’avait soulevée de la sorte, prenant en compte minutieusement le moindre spasme et la moindre contraction dans l’unique but de sa jouissance, les émotions qu’elle avait ensevelies depuis sa rencontre avec Tom remontèrent à la surface comme un torrent de stupeur.
Pour s’abandonner entièrement, il fallait apparemment passer par cette lutte du désespoir avant, puis la résignation, et enfin, l’acceptation. Elle arrêta quelques secondes ses gémissements de petite minaude que l’on baratte pour la première fois, et resta inerte, lourde de ses indicibles sentiments qu’elle allait vomir verbalement si cela continuait.
Elle se tut, laissant le mâle ardent ne faire d’elle que sa propriété dans l’asservissement le plus total, sans le poids des réalités refoulées.
Capitaine, amante, traîtresse et maintenant… dépendante, si toutefois le mot n’était pas si injuste par rapport à tout ce qu’elle voulait lui dire, quelle identité allait-elle revêtir au matin, lorsque la lumière cruelle du jour viendrait dissiper les ombres protectrices de ces multiples orgasmes nocturnes ? Dans la chaleur de son corps pénétrant le sien, elle sentait un déchirement qui l’a hantait alors qu’elle n’arrivait pas à percer le mystère de ce personnage qui était fraîchement arrivé dans sa vie et avait tout balayé sur son passage. Aimer et devoir ? Désir et loyauté ? Tout se faisait la guerre en elle, aux flux et reflux des vagues qui tapaient la coque de l’Oeil de Rubis.
Il n’y avait pas de victoire simple, mais Tom l’avait remporté haut la main. Elle continua à le fixer avec une intensité silencieuse, haletante et grognante, et se demanda si ces muscles et ce corps qu’elle n’arrivait même plus à sentir procurait quand même du plaisir à son compagnon chéri, ou s’il était particulièrement dur à l’idée d’avoir gagné la bataille puis la guerre.
“T…..Tom….” balbutia-t-elle, en gémissant à moitié. “J’ai besoin… ah…. De savoir…. Qu’adviendra t-il de nous… ah… une fois la nuit terminée ?”
Cette première étape de questionnement la délivra tellement d’une première pression que ses glandes de Skene se vidèrent gracieusement, expulsant telle une superbe fontaine une abondante quantité de liquide sur les soieries dispatchées dans la cabine.
Le cri qu’elle délivra était une ôde à la liberté, et la manifestation inexorable qu’elle ne pouvait plus ignorer. Il était fait pour elle, et serait désormais la source de ses hantises… autant que sa propension énorme à augmenter l’hygrométrie.
Tom sentit le changement presque imperceptible dans le corps de Max, un signal que sa lutte intérieure avait atteint un point de non-retour. Son regard, plongé dans le sien, était devenu un abîme de vulnérabilité, et il y perçut une soumission totale, mais aussi une curiosité désespérée. Il la sentait sur le point d’exploser sous le poids de ses propres contradictions, et cela réveillait en lui un sentiment complexe de satisfaction mêlée à une responsabilité écrasante.
Le cri de Max résonna dans la cabine, une mélodie brute et sauvage, qui fit écho dans les recoins sombres de son esprit. Alors que la chaleur de son corps envahissait le sien, le contrebandier sut qu’il avait franchi une étape cruciale, une barrière invisible mais essentielle qui séparait la simple conquête de la véritable possession. Mais il savait aussi que cette victoire avait un prix : l’âme de Max, cette flamme indomptable qu’il avait fini par apprivoiser.
Il maintint son regard dans le sien, ses mouvements ralentissant légèrement, comme pour graver cet instant dans la mémoire de son amante. Ses doigts caressaient doucement son visage, en effleurant les contours avec une tendresse inattendue. Il voulait qu’elle comprenne qu’il ne s’agissait plus simplement de domination, mais de quelque chose de bien plus profond et complexe. Quelque chose qui dépassait les simples jeux de pouvoir auxquels ils s’étaient livrés jusqu’à présent.
« Max… » murmura-t-il, sa voix rauque d’émotion contenue. Il n’était pas homme à se laisser emporter par des élans sentimentaux, mais en cet instant, il ne pouvait ignorer l’intensité du lien qu’ils avaient créé. « Ce que nous avons ici, cette nuit… c’est plus qu’un simple moment. C’est une révélation. Une vérité que ni toi ni moi ne pouvons ignorer. »
Il sentit son corps se raidir légèrement sous lui, comme si elle cherchait à comprendre, à saisir le sens de ses mots, tout en étant encore prise dans les vagues de plaisir qui l’assaillaient. Tom poursuivit, ses mains glissant sur son corps, explorant chaque courbe, chaque creux avec une attention redoublée.
« Je ne peux pas te promettre de réponses simples, ni même de te dire ce que demain nous réserve… mais je peux te promettre une chose, Max : tant que je serai avec toi, je te connaîtrai mieux que quiconque. Je te protégerai de toi-même si besoin… »
Il accentua le rythme de ses mouvements, chaque poussée devenant plus intense, plus déterminée. La chaleur de son corps semblait se fondre avec celle de Max, et il pouvait sentir la tension monter en elle, la poussant à la limite de ses sensations.
« Et si demain… tu te demandes encore ce que tout cela signifie… rappelle-toi seulement que cette nuit, ici, dans cette cabine, il n’y avait que nous. Et que ce que nous avons partagé… personne ne pourra jamais l’effacer. »
Max n’avait plus aucune conscience de qui elle était. Plus rien ne subsistait de l’indomptable capitaine, la vénérée des pirates, la chasseresse insaisissable. Ses années d’errance étaient désormais derrière elle, emportées dans les confins d’une extase infinie. Cet hymne silencieux à l’amour, à l’abandon de soi dans les bras de l’autre, était une transe mystique où l’esprit et la chair ne faisaient plus qu’un.
Épuisée, hormonalement instable et encore éméchée de toute la bière ingurgitée, elle laissa d’abord échapper une larme cristalline sur ses joues. Elle ne tenta pas de l’arrêter, ni la deuxième, ni la quinzième, laissant ce flot silencieux exprimer les mots qu’elle ne pouvait prononcer. Un mélange enivrant de joie pure et d’une mélancolie certaine, un déluge de sensations si fortes dans un refuge qu’elle n’espérait pas éphémère.
D’un côté, elle se disait tout en se faisant secouer que cette allégresse profonde était amplement méritée et qu’elle aussi avait le droit inaliénable au bonheur. De l’autre, une tristesse profonde, ancrée par une conscience aiguë de l’éphémère, du caractère fragile et passager de ce moment qui frôlait la perfection. Elle pleurait, pour tout ce qui avait été, et pour tout ce qui ne sera jamais, et pour aussi ce qui allait être à venir. Une joie douloureuse et vive comme son entrejambe… de celles qui ne peuvent éclore que dans les moments intimes où l’âme se révèle dans sa nudité la plus immaculée.
Et si, demain, les vents de la mer emportaient cet homme vers un autre horizon ? Et si le tumulte des vagues, de ses vagues à elle, était trop intense pour lui ? Cette passion ne risquait-elle pas de le submerger, de l’emporter loin d’elle sur un rivage auquel elle n’aurait plus jamais accès ?
Les attachements étaient des chaînes et il était devenu en si peu de temps, cette ancre qu’on ne peut jamais lâcher sous peine de rester en plein milieu de l’océan et d’y rester jusqu’à la mort. Jusqu’à ce que la saline vous dévore les lèvres, jusqu’à ce que l’iode vous ouvre les naseaux et que le zénith vous consume jusqu’à l’épiderme.
Les sanglots devinrent de plus en plus déchirants, jusqu’à prendre une place beaucoup plus importante que les gémissements de jouissance. Toutes ces écumes lacrymales portaient le poids de ses doutes, de ses incertitudes, de ce terrible fardeau qu’était ce tout nouveau sentiment qui roulait sur sa solitude. Un maelstrom intérieur dont elle ne pouvait plus du tout s’extraire. Les liens de ses cordages étaient encore plus serrés : en essayant de s’y extirper, elle avait malencontreusement fait l’effet inverse, et ils lui faisaient l’effet d’un garrot.
Harkness ralentit dans ses mouvements, restant finalement immobile au-dessus d’elle, les doigts encore enroulés autour de ses hanches. Il plongea son regard dans le sien, baigné de larmes. Ce n’était plus la même femme insaisissable qui se tenait devant lui, mais une âme mise à nu, crue, fragile.
Sans un mot, le contrebandier desserra ses doigts, et avec une douceur inattendue, défit les liens qui retenaient ses poignets, après l’avoir légèrement fait pivoter sur le flanc. Ses gestes étaient lents, comme s’il craignait de briser encore davantage ce qui venait de se révéler entre eux. Une fois libérée, il la serra contre lui, non plus dans un élan de désir brut, mais dans une étreinte emplie de réconfort et de tendresse.
Il glissa une main dans ses cheveux, ses doigts effleurant ses mèches avec délicatesse, tandis que son autre main parcourait son dos dans une caresse apaisante. Il resta silencieux, respectant le moment de vulnérabilité de Max, laissant ses larmes couler librement contre son torse.
Il recula, juste assez pour lui offrir un regard, tout en maintenant son étreinte. “Je serai là. Même quand tu te perds dans cette tempête en toi.”
Lentement, il essuya une larme de son visage du bout des doigts. Ce n’était pas une promesse vide, ni une déclaration solennelle, mais un simple constat. En cet instant, tout ce qu’il voulait, c’était lui offrir un peu de répit, de stabilité et de paix dans le tumulte de ses émotions.
Sa présence se voulait désormais rassurante, un ancrage dans cette tempête intérieure.
Max, les yeux encore embués de larmes, sentit les mots se nouer dans sa gorge encore en proie aux spasmes et aux divers hoquets dont elle avait tout le mal du monde à se départir. La mer fumante rugissait, l’équipage commençait à maugréer des insanités diverses dans des langues Gongiennes, mais en cet instant, il n’existait plus que Tom. Lui et lui seul. Lui qui éclipsait le monde entier.
Elle lâcha un soupir long et fractionné, puis murmura :
“Tom… je t’aime. Et je t’aime d’une manière que je ne saurai décrire. C’est à la fois une tempête et un abri, un feu qui consume et une vague qui m’engloutit. Avant toi, avant cette nuit de la veille, je n’étais qu’une ombre errant sur l’eau morne et lancinante, sans attache, ni destination. Mais toi… Oh Tom…”
Elle sanglota à nouveau, se pinça les lèvres et frotta nerveusement sa paupière mobile comme pour balayer la brume naissante qui l’empêchait de voir son amant.
“Quand je te regarde… je vois l’infini. Un avenir où le temps lui-même s’est arrêté pour s’offrir à nous. Suspendus hors du monde. Hors de tout. Je t’aime Tom, je t’aime pour ce que tu es, mais aussi pour ce que je deviens, car tu me révèles à moi-même. Je me sens… entière… mais pourtant…”
Elle tourna la tête vers le plafond, comme pour convaincre les Dieux de lui accorder un vœu viscéral.
“Si vulnérable…”
Ses deux mains rejoignirent son visage. Elle replaça sa chevelure d’ébène derrière son crâne, plaquant quelques mèches collées de transpiration, car ce qu’elle allait dire nécessitait tout de même un peu de prestance. Le sang recommençait à circuler lentement à travers ses poignets frêles de femme si fragilisée par cet espace-temps.
“Si cette tempête devait nous emporter, si je devais mourir, je t’assure, Tom, que je partirais sans nul regret. Avoir aimé de cette manière, même de façon si courte et rapide, c’est avoir touché l’éternité. Je ne te promets pas un avenir sans nuages, ni des jours sans tumultes, mais j’en fais le serment et que la houle m’emporte, tant que je vivrais, tout cela ne fléchira jamais. Tu es l’ancre qui maintient désormais mon être à flot dans l’incertitude de ce monde si féroce”.
Quelques secondes furent nécessaires à la Shakrass pour expirer un peu d’air volé dans cette cabine où les volutes de bougies et d’encens, cumulés à une humidité lourde et une chaleur insoutenable, rendaient les paroles plus compliquées à prononcer qu’elles n’en avaient l’air.
Puis, une énorme vague se brisa sur le côté babord de l’Oeil de Rubis, opposé à la cabine. Le fracas se fit si dur que la porte de l’unique chambre s’entrouvrit sous l’impact. Le bruit sourd du bois contre les gonds résonna, comme une déchirure dans le tissu même du temps. Une légère arrivée d’eau renversa quelques pirates éméchés qui firent craquer les boiseries en découvrant, dans la pénombre, leur Capitaine nue comme un ver et ayant le nouvel invité mystérieux qui partageait sa couche. De rires et jurons, la fine équipe de bourrés s’adonna à un silence pensant, devant la nudité et la vulnérabilité de leur chère Capitaine. La Shakrass se leva, sans se soucier de se couvrir, et défiant le regard de ses hommes, elle posa sa main sur l’épaule de ce qu’elle considérait désormais comme l’amour de sa vie. Un peu comme pour marquer sa présence éternelle à ses côtés.
“Retournez à vos postes, bande de chiens mouillés” lança t-elle “ma vie intime ne vous regarde pas. Laissez la mer faire son œuvre, et occupez-vous de garder ce navire à flot.”
Les pirates, encore un peu sous le choc de cette scène des plus atypiques, échangèrent quelques regards hâtifs. Ils savaient que discuter les ordres de Max serait une folie pure. La porte se referma doucement derrière eux, isolant de nouveau sa cabine – enfin, leur cabine – du reste du monde, face à la tempête qui grondait dehors.
Tom tourna son attention vers Max, qui avait maintenant marqué son territoire, affirmant sa présence dans une véritable déclaration de pouvoir et d’amour. Elle se tenait là, défiant encore le monde entier. Il se rapprocha d’elle à nouveau, sa main glissant doucement sur son visage, épousant les courbes de sa mâchoire. Il l’embrassa tendrement sur le front, dans une marque d’affection pure et simple qui contrastait avec l’intensité de ce qu’ils venaient de partager.
“Toujours fidèle à toi même, hein ?” murmura-t-il, avec une pointe d’amusement tendre.
Il prit une profonde inspiration, appréciant les fragrances et la chaleur du corps de la Shakrass contre le sien. La cabine était redevenue leur sanctuaire et il lui offrit un sourire réconfortant, conscient que les défis à venir seraient nombreux, mais qu’ils les affronteraient ensemble, solidement ancrés dans ce lien unique… Un lien qu’on ne tisse qu’au milieu des tempêtes.
Elle laissa sa tête reposée quelques secondes contre son torse, écoutant les battements réguliers de son cœur, prête à explorer cette mer de tourmente mais aussi d’amour. Elle savait que le monde pouvait se déchaîner autour d’eux, elle n’avait jamais été aussi sûre de sa place qu’ici, avec lui.